Directions de Lumière : La Face

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Directions de Lumière : La FACE (* Source ADEC 56)

Les projecteurs sont dits de face quand ils éclairent dans le même axe et la même direction que le regard du spectateur. Un comédien regardant Côté Cour sera éclairé de face par les projecteurs situés en coulisse côté Cour mais ces projecteurs seront nommés latéraux car ils le sont pour le regard du spectateur.


Autrement dit, la conception de la lumière et le choix de ses directions se font toujours en fonction de ce que verra le spectateur de là où il est. L’espace à éclairer est polarisé par la place du spectateur. Ça semble être une évidence : pourtant, dans l’action (réglage, occultage ...), on peut facilement perdre de vue cette évidence...et si on n’a pas un oeil dans la salle au moment du montage, perdre beaucoup de temps pour des broutilles.


Pour le spectateur, la lumière de face est ainsi une lumière qui reste dans l’axe de son regard dans la limite de + ou - 45° sur la droite ou sur la gauche. C’est la lumière de la visibilité. Elle permet de voir la totalité visible du visage, des yeux et du corps du comédien et fait disparaître les ombres sur ce corps et sur ce visage. L’inconvénient de la Face, en atténuant ainsi considérablement les ombres, c’est qu’elle « écrase » les volumes, elle les aplatit et transforme l’espace en 3 dimensions du plateau en un espace perçu comme plan à 2 dimensions, où tous les éléments éclairés tendent à avoir la même « valeur » dans l’image produite. Tout est visible mais rien ne se détache.

Moins cette face est accrochée en hauteur (c’est-à-dire, plus elle est horizontale), plus elle fait disparaître les ombres (et donc appauvrit le relief) du corps et du visage du comédien. De la même façon, moins elle est haute, plus elle éclaire le rideau de fond et projette sur lui ou sur le décor des ombres qui rendent hyper-présentes et palpables les dimensions réelles du plateau. Le noir du rideau de fond devient plus clair et gris : il perd sa capacité « noir intense » à agrandir et approfondir l’espace du plateau, à nous faire rêver l’espace. Ce qui est un défaut peut devenir une qualité : en effet, si à une scène onirique avec un rideau de fond d’un noir intense et profond, avec un beau contre-jour et quelques latéraux etc., succède une scène où l’auteur souligne la cassure ou la sortie du rêve et le retour de ses héros à leur dure réalité, le passage à une lumière de face peut venir fortement évoquer la grisaille et l’étroitesse de l’espace qui se referme sur les héros qui tout à l’heure évoluaient librement en plein rêve dans un espace immense.

La FACE   La FACE


Il existe une possibilité de diminuer l’écrasement du relief avec la lumière de face en la positionnant à 45° en azimut et à 45° par rapport à l’axe de son site . Dans ces limites-là, elle reste une lumière de face tout en acquérant un peu des qualités de la lumière latérale et de la lumière en douche : elle produit alors de légères ombres qui permettent un relief minimum tout en sauvegardant la visibilité.

La lumière de face étant celle de la visibilité du comédien, c’est elle qu’il faut assurer en priorité. Autrement dit, il faut s’assurer d’abord que les comédiens seront visibles (ou potentiellement visibles) sur l’ensemble du plateau. Ceci étant fait, il y aura tout loisir ensuite de jouer avec l’intensité de cette lumière de face pour qu’elle ne vienne pas « effacer » ou « concurrencer » les directions de lumières clefs spécifiquement choisies.

Il existe une méthode pour assurer rationnellement un plein feu qui prodigue des lumières de face sur tout le plateau : c’est la méthode MacCandless. Elle part du principe de l’angle de 45° pour le site et l’azimut et attribue à chaque zone du plateau 2 projecteurs aux directions opposées. L’angle de 45° est un angle « idéal », optimal : il n’est pas toujours possible de le réaliser mais il est important de s’en approcher. Les deux projecteurs éclairant la même zone peuvent ne pas être de la même « couleur » [l’un avec une couleur chaude (Lee Filters gamme des CTO) et l’autre avec une couleur froide (Lee Filters gamme des CTB) par exemple] afin de favoriser, par contraste, le relief (sachant que l’addition de ces deux couleurs complémentaires se rapprochent du blanc. Tous les projecteurs ayant la même direction auront aussi le même filtre (exemple : sur le schéma ci-dessous, tous les projecteurs de droite peuvent avoir un filtre légèrement « froid » et ceux de gauche avoir tous un filtre légèrement « chaud »). Les deux projecteurs peuvent aussi être réglés à des intensités légèrement différentes, toujours pour favoriser le rendu du relief : ce qui veut dire en ce cas que les deux projecteurs éclairant la même zone ne doivent pas être couplés (ce qu’on a très facilement tendance à faire).

Système MacCandless : faces à 45°

Système MacCandless : faces à 45° (azimut et site)

En cas d’impossibilité à suivre la méthode MacCandless (pas d’espace suffisant en largeur ou en hauteur), il est intéressant néanmoins de retenir l’idée de 2 projecteurs de face par zone, à la fois pour assurer la visibilité et ménager un minimum de relief.

Avec ces 12 projecteurs, on sait que le comédien sera visible où qu’il soit

Avec ces 12 projecteurs, on sait que le comédien sera visible où qu’il soit

Étant donné que cette lumière de face « aplatit » et « affadit » l’image, il faut l’utiliser modérément : suffisamment pour que le comédien soit bien visible et suffisamment peu pour ne pas effacer les autres directions de lumière choisies spécifiquement pour une scène ou un tableau. Cet équilibre ou cette balance de la face est ce qu’on appelle le « Rattrapage de Face ». Cela veut dire aussi qu’il n’est pas forcément utile d’utiliser tous ses 1000 Watts à la face et ses 500 Watts en contre-jour mais qu’il peut être plus judicieux de mettre les 1000 sur les perches de contre-jour et les 500W (ou les 650W) sur les perches de face (les plus puissants, les 650W, sur la perche en salle la plus lointaine et les 500W sur la première perche au-dessus de la scène). Si l’on ne peut pas avoir l’angle latéral de 45°, il est important néanmoins de garder le parallélisme des faisceaux pour tous les projecteurs de face d’une même direction (cohérence de la lumière).

Dans le schéma ci-dessous, on a 4 circuits : les circuits n°1 et n°3 sont en couleur chaude, tous les faisceaux parallèles. Le circuit n°1 couple 3 PC 650 Watts et le circuit n°3 couple 3 PC 500 Watts (ce qui donne au maxi 1950 W sur le circuit 1 et 1500 W sur le circuit 3). Les circuits n°2 et n°4 couplent les mêmes types de PC en couleur froide et ont aussi tous leurs faisceaux parallèles (cohérence de la source de lumière). En jouant sur l’intensité des circuits « chauds » et l’intensité des circuits « froids » (ou, si on n’a pas mis de filtres : en jouant asymétriquement sur les intensités de ces 2 sortes de circuits), on peut obtenir de nombreuses valeurs dans le rattrapage de face qui couvre tout le plateau. La puissance de cette implantation de face monte (à son maximum, juste pour le calcul) à 6900 Watts, ce qui correspond à 7 PC 1000 Watts au niveau de la puissance mais qui permet bien d’autres possibilités, notamment au niveau de la tonalité de la lumière et au niveau du relief que donnent les deux directions de lumière sur la même zone.

Réglage de La FACE en 4 circuits

Dans l’éclairage de face par zone, il faut penser à déborder avec chacun des deux projecteurs de la zone sur les zones adjacentes pour joindre les zones entre elles sans trop marquer le sol. Pour cela, les Fresnel sont les meilleurs car les bords de leur faisceau sont flous. Si on n’a pas de Fresnel, on peut utiliser des PC à lentille martelée ou encore munir des PC à lentille claire d’un filtre flouteur type « Frost ».

Quelques éclairages de face dans la peinture :

Détail de « La Source » de Jean-Auguste-Dominique Ingres.
Avec cet éclairage de face, les reliefs sont peu marqués mais ils sont néanmoins présents grâce à la hauteur de la source de lumière qui laisse une ombre sous l’arcade sourcilière droite de la jeune femme, sous son nez et sous son menton. Il s’agit d’une lumière de face haute (qui a acquis une petite proportion des qualités de la douche) et très légèrement latérale. Le personnage se « détache » grâce au contraste clair et obscur (corps-fond) et aussi grâce au ton rompu du fond qui contient du vert, ce qui le repousse à l’arrière-plan.
Exemple éclairage d'un tableau
Exemple éclairage d'un tableauToujours Ingres. Un éclairage de face provenant légèrement d’en haut à gauche, ce qui donne l’ombre sous le menton, l’ombre légère sous la lèvre inférieure et très légère sous le nez. On aperçoit l’ombre du personnage sur le fond ainsi que l’impact de la source de lumière : tache plus claire à droite du personnage. Le visage et les yeux (sombres) sont très présents (visibilité donnée par l’éclairage de face). Le personnage ressort pourtant nettement du fond au niveau du visage malgré l’éclairage de face ... Le visage qui renvoie une forte lumière est pris dans un contraste très fort entre les cheveux bruns et la chemise blanche tandis que la majeure partie du tableau, le fond comme le manteau réalise une unité en tons rompus qui font ressortir encore plus la tache de lumière du visage.
Sainte Marie-Madeleine de Le Pérugin. La lumière de face estompe presque complètement le relief du visage. On voit par contre parfaitement les yeux et même plutôt le regard. Le noir du fond reste noir ... malgré l’éclairage de face, et procure un fort contraste clair-obscur. Quand on regarde le visage, l’oeil est surtout attiré ... par les yeux !, yeux qu’on peut nettement « lire ».
L’été à 14h00, tournez le dos au soleil, vous avez devant vous un méga éclairage de face ... sauf ... s’il ne fait pas beau.
Exemple éclairage d'un tableau
Réglage de La FACE - Eclairage

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